Un directeur américain antisyndical est tout à coup remplacé - mais même la nourriture achetée par les syndicats est taboue

Imerys doit respecter les droits syndicaux, le dirigeant syndical mondial informe le rassemblement américain

ICEM Mise à jour, No. 24/2000, 27 mars 2000

IMERYS, LA SOCIÉTÉ MULTINATIONALE de céramique, minéraux et matériaux de construction doit reconnaître sans plus attendre les droits syndicaux des travailleurs américains.

Voilà le message de Fred Higgs lorsqu'il s'est adressé aux travailleurs d'Imerys qui l'acclamaient lors d'un rassemblement à Sylacauga, Alabama, samedi passé.

Higgs est le secrétaire général de la fédération internationale du syndicat de la Chimie, des Mines et de l'Énergie (ICEM), qui a fait campagne contre la position antisyndicale adoptée par Imerys dans ses usines américaines. Le syndicat des travailleurs américains d'Imerys, PACE, est un membre de l'ICEM.

PACE et ICEM "rendront la situation intenable pour Imerys et ils seront obligés de trouver une solution," Higgs a promis plus des 250 travailleurs présents. Ils répondirent en raillant Imerys et en chantant "ICEM" et "PACE Will Be In Your Face" (PACE vous fera face). La restructuration qui a conduit à la formation d'Imerys l'année passée incluait la fusion d'usines de production syndicalisées et non syndicalisées aux États-Unis. PACE veut à présent avoir la possibilité de représenter les travailleurs partout dans les usines fusionnées d'Imerys, mais la société a engagé des briseurs d'actions syndicales professionnels pour décourager l'organisation syndicale et bloque toutes tentatives des travailleurs à décider s'ils veulent ou non être syndiqués. Imerys est basée en France où les syndicats défendent la campagne des travailleurs américains. Ils sont aussi soutenus par les syndicats en Angleterre où Imerys a de grands sites de production et en Belgique où les financiers de la famille Frère possèdent des intérêts importants dans Imerys.

En Europe, Imerys reconnaît les syndicats et a pris une approche de "partenariat social" dans ses relations industrielles. Higgs a appelé Imerys une "corporation caméléon," l'accusant d'essayer aux États-Unis ce qu'elle ne tenterait jamais en Europe.

Les tactiques de la société aux États-Unis ont jusqu'à présent inclus des réunions obligatoires dans lesquelles on montre aux travailleurs des vidéos qui assimilent les syndicats à la Mafia. Au rassemblement de samedi, Higgs indiqua aux travailleurs américains qu'Imerys employait aux États-Unis des méthodes de relations industrielles qui seraient illégales en Europe.

Higgs nota aussi le départ soudain, la semaine passée, de Dennis Rediker. Avant la vente d'English China Clays au précurseur d'Imerys, Imetal, ECC était dirigée par Rediker qui en était le président directeur général et l'un de ses actionnaires principaux. Après l'acquisition d'ECC par Imetal, Rediker devint vice-président de Georgia Marble, une compagnie dont Imerys est propriétaire, et dirigeait sa division pigments.

Rediker a un long passé antisyndical et PACE pense qu'il était la cause principale pour que l'attitude d'Imerys envers les syndicats aux États-Unis soit si radicalement opposée à sa politique européenne.

On ne sait presque rien des circonstances qui entourent le départ soudain de Rediker, mais l'on pense qu'il a été remplacé par les directeurs d'Imerys en France.

"Le fait que Rediker soit parti maintenant n'est pas une coïncidence," a dit Higgs. "C'est symptomatique d'un désaccord idéologique entre la direction américaine et le centre."

Les speakers au rassemblement de samedi incluaient Don Langham, vice-président de PACE et membre de la direction d'ICEM, Stuart Burkhalter, Président de la branche de l'état d'Alabama de la fédération du travail AFL-CIO, Jimmy Colston, le représentant de PACE qui organisa les syndicats à l'usine Georgia Marble il y a 29 ans (l'usine de Sylacauga où Imerys a dénoncé la convention collective) et le coordinateur régional d'ICEM pour l'Amérique du Nord, Ken Zinn.

Tous mirent l'accent sur la nécessité de se débarrasser de la campagne antisyndicale dans les usines américaines d'Imerys.

Un petit incident bizarre nous montre l'urgence de cette tâche.

Avant la réunion de samedi, la direction a dit à un certain nombre de membres du syndicat que s'ils emportaient avec eux de la nourriture du rassemblement ils seraient limogés.

La direction américaine d'Imerys a même peur des aliments achetés par le syndicat.

De quoi alimenter la réflexion à Paris.